Télétravail : se blesser en faisant tomber un objet, est-ce un accident du travail ?

Le télétravail, bien que confortable pour l’équilibre vie pro/vie perso, a ses aléas. Votre logement et ses équipements peuvent vous causer quelques désagréments : chute d’objets, coupures, brûlures avec des appareils électroménagers… Les accidents domestiques sont vite arrivés. Une salariée en a fait les frais récemment, en se fracturant le pied après avoir fait tomber sa table à repasser dessus, lors d’une journée de travail chez elle. La justice lui a refusé la qualification d’accident du travail qu’elle demandait. On fait le point.

L’accident du travail doit relever de l’exercice de vos fonctions

Selon l’article L411-1 du Code de la Sécurité sociale, « est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail ». Le code du travail (article 1222-9) reprécise le cas du télétravail, soulignant que l’article de loi vaut aussi pour le travail à domicile. Sauf que plusieurs affaires semblent remettre en cause la qualification d’accident du travail.

La plus récente concerne une salariée sage-femme qui effectuait une formation chez elle. Pendant une pause, elle a ouvert un de ses placards et une planche à repasser lui est tombée dessus, lui occasionnant une fracture ouverte de plusieurs orteils. Elle demande alors la qualification d’accident de travail pour cette blessure mais le tribunal administratif de Paris a estimé qu’elle ne relevait pas de l’exercice de ses fonctions. « Cet accident doit être regardé comme un évènement détachable du service », a tranché le tribunal.

Pour être qualifié en accident du travail, la salariée aurait dû prouver que sa planche à repasser était utile à l’exercice de ses fonctions. Cela aurait pu être le cas, si elle utilisait cet appareil dans le cadre de son travail, par exemple, si le repassage du linge ou la manipulation de la table à repasser faisait partie de ses missions. Or, en tant que sage-femme, le lien avec cet objet était plus difficile à prouver. De plus, l’accident a eu lieu pendant un temps de pause, avant la reprise de sa formation et elle n’était donc pas sous l’autorité de son employeur.

Et se passer sur votre lieu ou pendant vos horaires de travail

Deux autres affaires rappellent aussi les limites de la qualification d’accident du travail dans le cadre du télétravail. Dans la première, une salariée s’était fracturé le coude en tombant, dans la minute qui avait suivi la fin de sa journée de travail. Elle disposait d’un logiciel de pointage indiquant qu’elle venait juste de se déconnecter mais la Cour d’appel d’Amiens a rejeté sa requête jugeant qu’elle n’était plus sous la responsabilité de son employeur, même si cela ne faisait qu’une minute !

Dans le deuxième cas, le salarié s’est blessé à l’extérieur de son domicile, heurté par la chute d’un poteau électrique. L’histoire paraît invraisemblable et pourtant elle s’est bien déroulée ainsi : alors qu’il venait de constater qu’il avait perdu sa connexion internet, le salarié était sorti et avait vu qu’un camion venait de cogner le dispositif électrique lui permettant d’avoir accès au réseau.

Entre temps, alors qu’il discutait avec le propriétaire du camion, un second véhicule a de nouveau endommagé le réseau électrique entraînant la chute d’un poteau. Ce dernier a blessé le malheureux salarié. Et, même si l’accident a eu lieu pendant le temps de travail, la Cour d’appel de la Réunion a estimé que la sortie du salarié n’avait rien à voir avec l’exercice de ses fonctions : son employeur ne lui avait pas demandé d’aller vérifier son installation électrique (pourtant nécessaire à son télétravail).

Deux cas complexes qui montrent bien les différentes subtilités de l’accident de travail à son domicile.

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