Comment aider mon collègue ou mon collaborateur qui a un TDAH ?
La docteure Mélodie Berthomieu, médecin du travail à Strasbourg et spécialiste du TDAH, nous en dit plus.

Un TDAH n’est pas une maladie ou un handicap, c’est un trouble du développement neuronal. En clair, la personne qui est atteinte de ce trouble a un cerveau qui est structuré et fonctionne différemment des autres personnes. Si cela lui permet souvent de développer certaines qualités, cela peut également entraîner des difficultés dans le monde professionnel. Voici ce qu’il faut savoir et quelques astuce simples à mettre en place si l’un de vos collègues ou collaborateurs est atteint de TDAH.
Qu’est-ce que le TDAH ?
Le trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) concernerait près de 3% des adultes en France. Un chiffre probablement sous-évalué selon le Dr Berthomieu, qui évoque un sous-diagnostic chez les adultes : « On serait plutôt sur un chiffre compris entre 4% et 6% ».
Ce syndrome résulte d’un développement neurologique atypique et s’accompagne généralement de trois grands symptômes, dont l’intensité peut varier selon les individus : inattention, hyperactivité et impulsivité. Mais il existe d’autres manifestations du TDAH, tout aussi fréquentes : trouble du sommeil, de la perception du temps (difficulté à estimer le temps que va prendre une tâche), trouble des fonctions exécutives (difficulté à planifier des tâches, à prioriser, à retenir les consignes, etc.), trouble de la régulation émotionnelle ou encore trouble du traitement sensoriel (perception sans filtres des bruits, odeurs, lumières, etc.)
« Ce sont des gens qu’on remarque assez facilement, explique Mélodie Berthomieu. Ils font du bruit, parlent vite, fort et beaucoup. Ils arrivent souvent en retard, oublient des choses et donnent parfois l’impression de brasser un peu d’air. En général, ils ne passent pas inaperçus. D’autant que ce sont souvent des gens très sociables. Ils ont d’ailleurs un contact moins protocolaire que les autres, notamment avec la hiérarchie, et cela peut leur poser certains problèmes. Les adultes TDAH sont également très créatifs. Par exemple, ils excellent dans les brainstormings et arrivent à trouver facilement de nouvelles idées. Même si on a parfois du mal à les canaliser, ce sont des collègues qui sont appréciés. Leur impulsivité fait qu’ils peuvent s’énerver très fort pour un petit rien puis redescendre en pression très rapidement. C’est à ce niveau que cela peut être particulier de travailler avec eux. »
Avoir un collaborateur TDAH dans son équipe, ce qu’il faut savoir
Les troubles induits par un TDAH peuvent poser de nombreuses difficultés dans leur vie professionnelle aux personnes concernées. La difficulté à tenir des délais ou à finir une tâche, à se concentrer, une forme de désorganisation chronique ou d’organisation obsessionnelle, des oublis fréquents, un goût du risque inconsidéré, une tendance à couper la parole… Les troubles de l’attention et de l’impulsivité peuvent jouer bien des tours à un salarié atteint de TDAH.
« Tous les TDAH ne se ressemblent pas mais d’une manière globale, ils ont une certaine difficulté à coller au modèle du salarié classique… à être un ‘adulte sage’, c’est-à-dire arriver à l’heure, respecter les échéances, être poli, etc. »
Pour la docteure Berthomieu, l’une des principales difficultés pour un adulte TDAH est en fait de garder un poste fixe : « Ils ont besoin d’être stimulés en permanence. Conducteur de train est par exemple l’archétype du métier à ne pas faire quand on a un TDAH, en raison de la monotonie. Pareil pour le travail à la chaine. Et même s’ils exercent un métier stimulant, sans monotonie, ils peuvent claquer la porte du jour au lendemain, par exemple pour une parole maladroite de leur hiérarchie. Ils ont donc très souvent des parcours atypiques. »
On retrouve pourtant chez une personne TDAH des soft skills qui peuvent s’avérer précieuses dans une équipe comme l’enthousiasme, la curiosité, l’empathie, la spontanéité ou encore l’honnêteté. Des études scientifiques ont par ailleurs montré que ces personnes étaient aussi beaucoup plus créatives et possédaient de bien meilleures capacités d’innovation que la moyenne, grâce à leur façon de penser en arborescence. Des qualités qui en feraient même d’excellents entrepreneurs !
« Les métiers qui leur plaisent beaucoup sont l’enseignement – car ce sont des passionnés et donc ils aiment transmettre – la communication, les médias, les métiers artistiques en général. Tous les métiers dans lesquels on produit quelques chose, car il y a de la nouveauté en permanence, et aussi ceux dans lesquels on s’adresse aux gens car ils ont un bon contact avec le public. Mais les métiers plus classiques comme expert-comptable ne sont pas vraiment adaptés pour eux. »
Quelques astuces pour aider un collaborateur ou un collègues TDAH
Avec un accompagnement spécifique, il est possible de contrecarrer au mieux les inconvénients du trouble de l’attention pour que la personne concernée s’épanouisse dans sa vie professionnelle. En tant que collègue ou manager, vous avez un rôle non négligeable à jouer ! Tout d’abord dans l’aménagement de l’espace de travail.
Ce qu’il faut éviter : Les open-space, les bureaux avec un environnement bruyant ou jouxtant un lieu de passage.
Ce qu’il faut privilégier : les bureaux individuels dont la porte peut être fermée, les casques à réduction de bruit.
La docteure Bethomieu précise néanmoins que le plus important est que l’environnement soit contrôlable : « Certains adultes TDAH ont du mal à travailler dans le silence et se sentent plus productifs au milieu d’un café. Donc oui, un bureau seul est parfait mais ce qui compte c’est le contrôle du bruit, pouvoir ouvrir ou fermer la porte selon les besoins. Car au-delà du fait d’être distrait par le bruit, la non-filtration des informations sensorielles peut leur procurer une sensation vraiment désagréable. A ce titre-là, autoriser et fournir des casques à isolation phonique est une excellente initiative. »
L’aménagement des horaires de travail est aussi recommandé, notamment pour permettre au salarié TDAH de commencer plus tard et finir plus tard : « Ils ont une horloge biologique interne décalée de quelques heures. On ne demanderait pas à une personne neurotypique de se coucher à 17h ! »
« Le manager doit le comprendre, se renseigner et accepter la situation en évitant de stigmatiser son collaborateur, avoir une attitude tolérante et bienveillante. Par exemple au lieu de faire 8h-16h, on peut déjà tenter 9h30-17h30. On parle d’un trouble neurologique et non contrôlable qui représente de réelles difficultés pour le salarié. »
En tant que manager, veillez également à ce que votre collaborateur prenne bien ses pauses et ne se laisse pas déborder par son travail. Mais c’est surtout dans les tâches que vous confiez et dans votre façon de manager que vous pouvez avoir un impact significatif. « C’est toute une stratégie de communication détaille Mélodie Berthomieu. L’idéal est de donner des consignes courtes à l’écrit. De transmettre l’information la plus épurée et claire possible. Ce qui compte est d’être concis. C’est très important que ce soit fait à l’écrit car une personne TDAH a une mauvaise mémoire de travail, celle qu’on utilise pour appliquer les consignes. Vous ne devez pas non plus hésiter à fixer des échéances car cela donne de la motivation à initier une tâche. On active alors le levier motivationnel de l’urgence. Or ce sont souvent des gens qui procrastinent. »
Voici quelques adaptations simples à mettre en place, que vous pouvez retrouver sur les plaquettes en ligne créées par notre médecin spécialiste :
- Hiérarchisez les tâches que vous donnez : dites clairement ce qui est prioritaire et ce qui peut attendre
- Donnez des instructions courtes, claires et écrites.
- Ne délivrez que les informations strictement nécessaires (abstenez-vous de toute information parasite)
- Vérifiez toujours que les consignes ont été bien comprises.
- Scindez les tâches en plusieurs sous-tâches
- Donnez les sous-tâches à faire au fur et à mesure.
- Vérifiez que la tâche précédente ait été correctement réalisée avant d’en donner une nouvelle
- Mettez à disposition une check-list sur un support physique pour les tâches fréquentes (avec les points à ne pas oublier)
- Fixez des échéances claires et proches dans le temps.
- Envoyez uniquement les mails strictement utiles.
- Diversifiez le plus possibles les tâches sur la journée.
- Évitez le travail trop répétitif.
- Proposez des formations régulièrement pour faire monter en compétences le salarié afin d’éviter plus facilement la routine.
- Félicitez et soulignez le succès dans les tâches accomplies
- Préférez les petites récompenses régulières aux plus grandes récompenses éloignées dans le temps.
- Soyez à l’écoute des besoins de votre collaborateur et demander lui directement de quelle aide il pourrait avoir besoin face aux difficultés rencontrées.
Crédits photo : Kay A/peopleimages.com/stock.adobe.com
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