La novlangue de bureau décryptée #3 : l'onboarding

"Ladies and gentleman, vous venez d'intégrer votre nouvelle entreprise. Attachez votre ceinture, de fortes turbulences sont annoncées sur l'ensemble du parcours". Voilà, en gros, un résumé de l'onboarding, ce nouveau mot "cool" utilisé par les services des ressources humaines pour désigner, ni plus ni moins, la période d'intégration en entreprise. Cette phase un peu particulière où le nouveau collaborateur doit apprendre tous les noms de ses futurs collègues, assister à la présentation des différents services sans toujours bien comprendre de quoi il s'agit ni pourquoi on lui fait subir cela, et bien évidemment donner la meilleure image possible de soi pour éviter d'être recalé avant la fin de sa période d'essai.

Mais, guerre des talents oblige, les entreprises se sentent, elles-aussi, obligées de donner le change et de s'assurer que les petits derniers trouveront bien leur place dans l'organisation et surtout qu'ils relaieront, à l'extérieur,  la bonne parole : "C'est vraiment une boîte sympa : tu te sens accueilli à bras ouverts".

> La France manque-t-elle d'incroyables talents ? 

Mythe ou réalité, la guerre des talents fait trembler les entreprises qui craignent que les dernières recrues partent d'elles-mêmes et les dénigrent ensuite ouvertement. Ce qui est vrai, c'est que 80 % des recrutés prennent la décision de rester ou de quitter une entreprise dans les premiers six mois, selon une enquête Aberdeen. Et que sur les 36 % de contrats en CDI rompus avant le premier anniversaire, 45 % le sont à l'initiative des salariés, selon la Dares. Les entreprises cherchent donc à mettre en place des programmes d'intégration pour éviter les coûts et financiers que feraient peser des départs anticipés. Comment ? Il n'existe pas vraiment d'onboarding type mais sur différents sites évoquant la responsabilité sociale des entreprises, on peut lire les conseils suivants pour bien intégrer les nouvelles recrues :

• Activer leur compte sur le réseau social de l'entreprise
• Faire une partie de ping-pong ou de baby-foot avec le ou les nouveaux collaborateurs
• Lire le guide de bienvenue
• Prendre une photo corporate pour l'organigramme interne
• Organiser des afterworks organisés avec les nouveaux entrants
• Dresser un mur de correspondance à l’entrée de l’entreprise où chaque salarié souhaite un bon accueil au nouveau salarié

> Faut-il organiser des afterworks avec ses collaborateurs ?

Quand la forme prime sur le fond

L'onboarding ressemblerait donc à un ensemble de bonnes pratiques pour donner l'image d'une entreprise moderne et sympa, à l 'opposé de l'archétype de la Cogip, cette fausse entreprise qui, en voulant paraître trop jeune et dynamique, sonne comme les "djeuns qui n'en veulent"... C'est bien évidemment un raccourci un peu dur de la vie d'entreprise mais qui témoigne de la principale dérive managériale actuelle : s'attarder sur la forme plutôt que sur le fond. Etre une entreprise sympa ne se déclame pas. Pour y parvenir, il faut s'assurer que les managers sont à la bonne place, écouter davantage les récriminations des collaborateurs, et y répondre quand ils sont répétés et pertinents, s'assurer que la politique de rémunération est juste, former le personnel, etc. Bref, c'est répondre à une question pas si facile mais que se posent de nombreux actifs : Est-ce que je vais m'éclater dans cette entreprise et les gens y sont-ils sympas ? Bonne chance...

> La novlangue de bureau décryptée #1 : les soft skills

> La novlangue de bureau décryptée #2 : la flexibilité

 Crédit photo Istock izusek