INTERVIEW. « Pour négocier son augmentation, l'erreur c'est de parler du passé alors qu'il faut miser sur le futur ! »

Votre entretien annuel vient d’être programmé ? Vous attendez ce début d’année avec impatience pour négocier votre salaire ? Sacha Kleynjans cofondateur de Ferway, un outil de gestion de la rémunération au sein des entreprises, nous donne ses meilleurs conseils pour obtenir l’augmentation que vous méritez !

Est-ce que 2025 sera une bonne année pour les négociations salariales ?

Sacha Kleynjans : On va rester sur la tendance de l’an passé, avec une augmentation des salaires autour de 3%. L’inflation a baissé (retombée à 1,1% en septembre sur an selon l’Insee) donc les niveaux d’augmentation devraient repasser au-dessus des prix en 2025. Ce qui est une bonne nouvelle car le choc inflationniste de l’an dernier pesait plus fortement sur les salaires. Par ailleurs, certaines entreprises commencent à appliquer la loi sur la transparence salariale. Elle ne deviendra obligatoire qu’à partir de juin 2026, mais beaucoup de DRH travaillent déjà sur ce sujet. Dans ce cas, les salariés peuvent dès maintenant savoir combien sont payés leurs collègues de même niveau, et éventuellement demander un rattrapage si leur rémunération s’avère inférieure.

Quels sont les secteurs qui devraient connaître les plus fortes hausses ? 

Sacha Kleynjans : Sans surprise, les salariés des secteurs de la tech n’auront pas de soucis à se faire, tout comme ceux qui travaillent dans l’industrie pharmaceutique.

Comment bien réussir sa négociation salariale en 2025 ?

Sacha Kleynjans : La première chose que je conseillerais c’est de ne pas se contenter uniquement du salaire fixe. En tant que salarié, on a tendance à tout miser sur le salaire brut mensuel, or il existe plein d’autres leviers à activer pour voir une augmentation sensible de son pouvoir d’achat. Par exemple, si vous estimez que vous avez particulièrement réussi à atteindre un objectif, vous pouvez plutôt solliciter l’obtention d’une prime. L’augmentation de salaire se justifie souvent seulement dans des cas où vous effectuez de nouvelles tâches, et que vous assumez des missions qui ne sont pas dans votre fiche de poste.

Enfin, évitez de parler de l’expérience passée, en faisant le bilan de votre année, c’est une erreur que font beaucoup de salariés. Il faut plutôt miser sur le futur ! Votre employeur veut s’assurer qu’il peut compter sur vous à l’avenir donc n’hésitez pas à vous projeter aussi sur l’année 2025 : ce que vous aimeriez développer, les projets ou compétences que vous souhaitez améliorer.

Il est aussi possible de demander une amélioration de ses conditions de travail, de négocier par exemple des avantages ou des variables. Sans oublier d’utiliser une autre nouveauté 2025 : désormais, les entreprises rentables de 11 à 49 salariés doivent, comme les plus grandes, proposer à leurs collaborateurs un mécanisme de partage de la valeur. Ce peut être, au choix de l’employeur, une prime, un plan d’intéressement ou une participation. C’est le moment de se renseigner sur ce qui est prévu !

C’est vrai que c’est un aspect auquel on ne pense pas forcément, vous voulez dire qu’on peut obtenir autre chose qu’une augmentation de salaire ?

Oui, et cela se fait de plus en plus. Comme je le disais, vous pouvez argumenter plutôt en faveur d’une prime si vous estimez avoir particulièrement bien rempli vos objectifs cette année ou réussi un projet qu’on vous avait confié, mais il est aussi possible de négocier des avantages horaires. Un jour de congé supplémentaire ou une flexibilité, par exemple. Les RH sont de plus en plus sensibles à l’individualisation des parcours de salariés au sein de l’entreprise et ils ont conscience qu’en fonction des âges de la vie, il y a parfois des besoins spécifiques.

Un jeune diplômé n’aura pas les mêmes attentes qu’un jeune parent ou qu’un profil avec 30 ans d’expérience. C’est également lors des entretiens annuels que vous aurez l’occasion de demander une mobilité interne, si vous avez envie d’évoluer sur un autre poste au sein de l’entreprise. En fait, au-delà du salaire, il faut se demander comment on se sent dans son poste de travail pour obtenir des avantages qui parfois peuvent vous faire gagner aussi en confort de vie.

Quels sont vos conseils pour les salariés qui ont vraiment du mal à aborder le sujet et à demander clairement une augmentation ? 

Sacha Kleynjans :  D’abord, il faut vraiment avoir en tête que le RH ou le manager que vous avez en face de vous parle de ce sujet toute la journée, donc il n’y a pas de tabou là-dessus. Préparez vos arguments, réfléchissez à vos missions tout au long de l’année, et renseignez-vous déjà au préalable sur la question de la politique des augmentations, surtout si vous venez d’arriver dans l’entreprise et que c’est votre premier entretien annuel.

Comment réagir si malgré l’application de tous ces conseils, notre employeur refuse notre demande d’augmentation ? 

Sacha Kleynjans : je conseille alors de rester dans une démarche positive, posez des questions pour comprendre la démarche de votre manager, montrez que vous êtes dans une optique d’amélioration de vos compétences. « Quels sont les points sur lesquels il faut que je m’améliore ? » « Est-ce que je peux me former ? » « Comment puis-je faire si je souhaite arriver à ce poste d’ici plusieurs années ? »