La lettre de motivation devient-elle has been ?

C’était l’un des sujets recrutement de la rentrée : selon une étude de Neurosight, 57% des candidats utiliseraient l’intelligence artificielle pour écrire leur lettre de motivation… Un chiffre qui pose la question suivante : y a-t-il encore un sens à rédiger une lettre de motivation ?

Pas plus d'informations

« On n’a pas eu besoin de l’IA pour avoir des lettres de motivation qui sont toutes les mêmes, et ne contiennent aucune information», explique Jean-Marie Caillaud, fondateur du cabinet de WorkMeTender.

Un avis tranché plus répandu qu’on ne pourrait l’imaginer : selon une étude de l’Apec (Association pour l'emploi des cadres), 50% des entreprises l’ont complètement abandonnée en 2023 pour recruter des cadres. En 2019, plus de deux-tiers d’entre elles la demandaient encore. Jean-Marie Caillaud enfonce le clou : « La lettre de motivation rajoute de la friction dans le processus de recrutement : globalement, les candidats n’aiment pas les faire et les recruteurs n’aiment pas les lire. Personnellement, ça fait 15 ans que je n’en demande plus, et je ne connais que peu de recruteurs qui en demandent encore. Et même parmi eux, je pense que peu les lisent vraiment. »

La disgrâce de la lettre de motivation s’observe en particulier dans les PME, qui sont généralement moins demandeuses de ce document. Parmi ces petites et moyennes entreprises qui ne la demandent plus du tout, 50 % le justifient par le fait qu’elle serait tout bonnement « inutile ». Les grandes entreprises qui ont fait le même choix, elles, évoquent en majorité le fait de « faciliter » le processus de recrutement.

Une perte de sens (et de temps)

Le peu d’intérêt de ces recruteurs pour la lettre de motivation explique-t-il le manque d'authenticité et d’informations qu’elles contiennent, ou est-ce le contraire ?

Avant d'essayer de répondre à cette question, probablement en vain, il faut d’abord s’interroger sur la nature-même de l’exercice : la lettre de motivation sert-elle vraiment à jauger la motivation réelle du candidat ? Pas vraiment, pour Jean-Marie Caillaud : « Le problème, c’est qu'elle n’est aucunement capable d’évaluer la motivation ! C’est du descriptif, du déclaratif. »

Force est de constater que d’autres techniques pour évaluer les motivations des candidats sont désormais préférées à la sacro-sainte lettre. L’Apec, dans l’étude précédemment citée, souligne par exemple que la présélection téléphonique est de plus en plus pratiquée par les entreprises : 71 % d’entre elles y ont eu recours en 2023… Soit 21% de plus que celles qui utilisent encore la lettre de motivation.

Corps de mail plutôt que document Word

Mais alors, comment tirer son épingle du jeu, si on ne se voit pas proposer un appel de présélection ? « Je préfère recevoir un CV avec un petit mot d’accompagnement avec deux infos de l’offre d’emploi qui ont tapé dans l'œil du candidat », suggère Jean-Marie Caillaud. 

Une opinion partagée par Hélène Ly, formatrice de recruteurs, et interrogée sur le sujet dans un podcast dédié produit par le site Capital : « L’idée ce n’est pas de juste envoyer son CV, et encore moins de copier-coller sa lettre de motivation, mais plutôt de faire un mail de candidature avec la référence de l’annonce, et un court message qui va droit au but. Quelque chose de moins formel et tout aussi efficace, voire encore plus efficace ! ». Dans les pays anglo-saxons, le mail de motivation est en effet beaucoup plus fréquent qu'en France.

Si la lettre de motivation vous est quand même demandée, comme c’est encore le cas dans beaucoup d’entreprises, notre conseil : jouez le jeu, et tentez de faire ressortir votre personnalité, apporter des éléments qui ne figurent pas sur votre CV, "d'authentifier" en quelque sorte votre candidature. Car malgré le discrédit croissant dont elle fait l'objet, la lettre de motivation n'a pas (encore) dit son dernier mot. 

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