Léa, apprentie mécanicienne auto : « Si on a l’envie et la détermination, on peut faire pareil que les hommes ! »

Bien évoluer dans le monde encore masculin de l’entretien automobile en tant que femme, c’est possible. La preuve par deux avec Déborah Binisti, directrice du développement du Groupe et Léa Mazuet, apprentie mécanicienne auto chez Point S.

Leur profil est bien différent mais toutes deux ont fait le choix d’entrer dans un monde où l’on croisait, il y a encore peu, un nombre réduit de femmes. Déborah, elle, fait d’abord ses armes dans un autre secteur, lui aussi masculin. « Mon parcours a commencé en alternance, il y a une vingtaine d’années, dans une ESN (entreprise de services du numérique). J’ai repris une école de commerce en cours du soir avant de rejoindre un des leaders internationaux de fabrication de pneumatiques. A l’époque, je ne savais même pas ce qu’il y avait comme type de pneumatique sur ma voiture ! » retrace-t-elle.

Via cette première expérience, Déborah découvre un univers passionnant : « Je suis tombée dans le chaudron, comme Obélix ! J’ai apprécié la technicité de ce monde, son ingéniosité. Je me suis progressivement passionnée pour ce « boudin noir » qui ne sent pas bon », sourit-elle. Après quelques années à Clermont-Ferrand, elle part pour le Benelux et devient la première femme commerciale itinérante pour la partie industrielle du groupe. De retour en France, elle évolue dans ses différentes filiales, toujours dans l’équipe industrielle. En 2021, elle rejoint Point S en tant que chargée de développement Ile-de-France et prend la direction du service, un an plus tard. Sa mission ? « Mon métier et celui de tout mon service est de recruter de nouveaux adhérents pour continuer à développer le maillage de Point S et sa notoriété. On est là pour accompagner des chefs d’entreprise dans leur projet », résume-t-elle.

« J’ai été étonnée d’être si bien accueillie »

De son côté, à 17 ans, Léa a toujours su qu’elle voulait faire de la mécanique son métier. Malgré quelques difficultés, elle a finalement décroché une alternance chez Point S Cluny (Saône-et-Loire), au mois de novembre. « A la fin du collège, je savais déjà que je voulais faire de la mécanique mais je n’ai pas eu le temps de trouver un apprentissage. Je suis donc partie en filière générale au lycée avec toujours cette envie de me lancer ! Pendant des mois, j’ai cherché un apprentissage en mécanique moto, sans succès », raconte-t-elle. Elle décide alors de se tourner vers la mécanique auto mais les places en formation sont chères.

Après une première STAV (sciences et technologies de l’agronomie et du vivant), elle finit par intégrer le CFA de Macôn en deuxième année de bac pro Maintenance des véhicules option A voitures particulières. A son arrivée chez Point S, elle effectue d’abord un stage d’une semaine afin de confirmer son choix. « J’ai été étonnée d’être si bien accueillie, en particulier en tant que femme ! Au départ, je redoutais de me lancer mais comme je ne m’imaginais pas faire autre chose, je l’ai fait ! » souligne-t-elle.

« Je leur montrais que je connaissais le métier »

Si Léa mise sur son caractère pour s’intégrer, Déborah constate qu’il n’est pas aisé pour une femme de se fondre dans ce monde, en particulier quand on est seule. « Cela peut être complexe car on veut être un loup parmi les loups, alors qu’on est une louve ! illustre-t-elle. A compétences égales, il a fallu que je me montre un peu plus que mes homologues masculins, en particulier avec les clients. Pourtant, je savais aussi bien qu’eux gérer du pneumatique industriel, trier des carcasses etc. C’est un secteur où l’on s’imagine encore parfois qu’une femme est mieux au chaud dans un bureau plutôt que dehors, à regarder les pneumatiques d’un camion. En Belgique, tout le monde se disait : « Il n’y a jamais eu de femme ici ! ». J’arrivais donc avec mes chaussures de sécurité, mon bleu de travail et je leur montrais que je connaissais le métier pour, ensuite, faire ma négociation commerciale. »

Avec le recul de son expérience, Déborah considère le fait d’être une femme dans équipe comme un « privilège » : « Dans toutes celles que j’ai pu intégrer, j’ai eu la chance d’avoir des collègues bienveillants, prévenants. Ils faisaient attention à leur manière de s’exprimer justement parce qu’il y avait une femme dans l’équipe », constate-t-elle. Chez Point S, il n’y a pas de distinction de genre, confirme-t-elle : « Tout le monde est sur la même marche de l’escalier ! On n’a pas d’accompagnement spécifique en tant que femme car on ne fait pas de différence. Si une cheffe d’entreprise souhaite monter son propre garage et adhérer à notre réseau, elle bénéficiera du même accompagnement qu’un homme. »

« Il y a des femmes passionnées d’automobile aussi ! »

Chez Point S, en particulier, les effectifs féminins sont assez importants, observe la directrice du développement : « C’est le cas dans les équipes du siège mais un peu moins sur le terrain. Or, j’ai eu la chance de recruter une femme dans mon service et j’espère d’autres à l’avenir ! Malheureusement, c’est toujours plus compliqué de trouver des candidates sur les postes de commerciaux itinérants. On est encore dans un monde où beaucoup de femmes assurent la gestion des enfants et de la maison. Cela tend tout de même à changer, je l’observe auprès de collègues masculins. L’égalité des sexes progresse ! » Au CoDir, les femmes sont même en majorité et Déborah est l’une d’elle. « Je suis impressionnée du nombre de femmes qui sont arrivées jusque-là. On voit bien que c’est une question de compétences et non de sexe ! » appuie-t-elle.

Depuis qu’elle l’a rejoint, Déborah a remarqué l’évolution du secteur sur la question. « Avant, être une femme dans le monde du pneumatique relevait de l’exception. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de techniciennes, de cheffes d’entreprise etc. car il y a des femmes passionnées d’automobile ! »

« Il faut avoir une passion pour l’entretien automobile ! »

Des évolutions qui bénéficient dorénavant à des profils comme ceux de Léa. Dans son équipe, à Cluny, la jeune femme est accompagnée dans sa progression technique par deux ouvriers et son patron. « Je fais un peu plus de choses toute seule maintenant ! C’était un peu compliqué au départ car je n’avais jamais fait de mécanique et j’ai dû rattraper l’année de seconde. Pour l’instant, ce que je préfère faire ce sont les gros entretiens comme les embrayages, par exemple », explique-t-elle.

L’apprentie mécanicienne conseille ainsi vivement à d’autres femmes de se tourner vers son métier : « Il faut oser se lancer même si au départ, cela peut faire un peu peur ! Quand on a trouvé la bonne entreprise, les bonnes personnes pour nous accompagner, cela se passe très bien. Si on a l’envie et la détermination, on peut faire pareil que les hommes ! » Son rêve : poursuivre ses études avec un BTS et un jour, ouvrir son propre garage. Et peut-être embaucher des mécaniciennes ?

Et Déborah de conclure : « Venez Mesdames ! On peut parfois être frileuse car c’est un monde méconnu de la gent féminine mais nous y avons notre place, de la technicienne en atelier à la comptable en passant par la cheffe d’entreprise. L’essentiel, avoir une passion pour l’entretien automobile ! »