L'économie du quaternaire, c'est pour quand ?

MAJ - Publié en 2018, cet article s'intéressait à un concept qui prend un sens encore plus aiguë avec la crise sanitaire et économique que nous vivons actuellement.

"Créer 4 millions d'emplois, c'est possible !" Cette formule choc n'est pas un slogan politique mais le sous-titre du dernier livre de l'économiste Michèle Debonneuil, La révolution quaternaire. Une révolution qui se fait attendre, l'auteur l'annonçant depuis le début des années 2000 déjà. Mais son concept demeure pertinent, surtout dans le contexte actuel...  L'économie quaternaire, c'est en effet utiliser les nouvelles technologies pour en faire un "gisement d'emplois, au lieu d'en être le tombeau". L'ubérisation sans crainte et sans délocalisation et qui remet l'homme au coeur de l'économie. "On découvre enfin que dans notre ère quaternaire, l’enjeu est la production des compétences et de l’intelligence. Que la chaîne de valeur se construit d’abord du côté de l’individu, qui est aussi le salarié et l’entrepreneur. Après avoir été un peu relégués au second rang, ces sujets de santé pourraient bien se retrouver dans des chartes éthiques et de RSE", expliquait, le 26 mars dernier, le sociologue Roger Sue au journal L'Opinion.

Créer des emplois non délocalisables

L' économie quaternaire serait la résultante du mariage entre les secteurs du secondaire (l'industrie) et du tertiaire (les services). "Ses produits ne sont ni des biens, ni des services, mais de nouveaux services incorporant des biens", peut-on lire sur Wikipedia. Les technologies de l'information rendent cette union possible. Avec, à la clé, la promesse d'emplois non délocalisables et plus respectueux de l'environnement. Des exemples ? "L’autopartage (Autolib’ à Paris), qui, contrairement au covoiturage (Blablacar…), allie technologie numérique (abonnement, réservations en ligne…) et emplois (des salariés entretiennent les voitures mises à disposition) ; ou la téléassistance pour personnes âgées (des capteurs de chutes préviennent un personnel qualifié qui se déplace au domicile du client), fleuron de la Silver Economy", écrit Jean-Louis Borloo dans la préface de l'ouvrage. Dans un cas, l'entreprise de covoiturage se contente de mettre en contact des particuliers et laisse la charge aux internautes de gérer leur voiture, dans l'autre, l'autopartage est une solution quaternaire, créant un service et des emplois. Un modèle dans l'air du temps qui implique de passer de la propriété à l'usage.

"Passer d'une vie à vouloir plus à une vie à chercher à être mieux"

En 2007, Michèle Debonneuil expliquait déjà que les produits de "l'économie du quaternaire seront conçus pour satisfaire les besoins des consommateurs aisés des pays développés et les feront passer d'une vie dans laquelle ils rêvaient d'avoir plus à une autre où ils chercheront à être mieux". Selon l'économiste, cette société de services est l'unique condition pour retrouver un avantage comparatif par rapport aux pays en voie de développement. Le marché du travail a déjà évolué dans ce sens. La crise semble avoir relancé les petits services de proximité, avec de nouveaux auto-entrepreneurs dépannant le voisinage. Les services à la personne regroupe déjà plus de 1,4 million de salariés : aide aux personnes âgés, ménages, etc pour 880 millions d'heures rémunérées.

L'économiste pointe une limite à son modèle : le troc "qui ferait fi de l'apport réel de l'économie de marché", explique-t-elle au Monde. Pour passer à une économie quaternaire, les entreprises doivent alors s'adapter aux nouveaux besoins des consommateurs et entrer dans l'ère de la co-création...